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Réserves à la réception : le maître d’ouvrage doit prouver le caractère caché des désordres

Par Valérie FRANÇOIS, Docteur en Droit, Avocat à la Cour.

La réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves (C. civ., art. 1792-6). La réception des travaux couvre tout vice ou défaut de conformité apparent qui n'a pas fait l'objet de réserves. En effet, en l’absence de réserve relative à un vice ou défaut de conformité apparent, les juges considèrent que le maître d’ouvrage a accepté l’ouvrage en l’état. Ce vice ou défaut de conformité doit toutefois pouvoir être décelé par le maître de l’ouvrage dans toutes ses conséquences et son étendue (Civ. 3e, 23 févr. 2000, n° 98-15.127). Les juges se livrent à une appréciation concrète, subjective, du caractère apparent ou non du désordre, eu égard à la compétence technique du maître de l’ouvrage ou à sa qualité de profane (Civ. 3e, 1er mars 2011, n° 10-11.759). Dans un arrêt rendu le 2 mars 2022 (Civ. 3e, 2 mars 2022, n° 21-10.753) rendu au visa de l'article 1315, alinéa 1er, devenu 1353, alinéa 1er, du code civil, selon lequel « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver », la Cour de Cassation rappelle tout d’abord le principe jurisprudentiel à caractère général selon lequel «il incombe au maître ou à l'acquéreur de l'ouvrage qui agit sur le fondement de l'article 1792 du code civil de rapporter la preuve que les conditions d'application de ce texte sont réunies » et confirme une jurisprudence déjà établie, selon laquelle la preuve du contenu des réserves exprimées lors de la réception des ouvrages et du caractère caché des désordres incombe non pas au constructeur mais au maître d’ouvrage (3e Civ., 7 juillet 2004, pourvoi n° 03-14.166, Bull., 2004, III, n° 142) ». C’est ainsi qu’au cas d’espèce, elle retoque une décision de la Cour d’appel de Pau qui avait condamné un entrepreneur à payer une certaine somme en indemnisation de la non-conformité du bois d’une terrasse en retenant notamment que cet entrepreneur ne rapportait pas la preuve du caractère apparent de cette non-conformité pour un maître d'ouvrage profane au jour de la réception. La Cour de Cassation affirme que la Cour d’appel de PAU a inversé la charge de la preuve ; que c’est en effet au maître d’ouvrage, qui réclamait l'indemnisation d'une non-conformité n'ayant pas fait l'objet d'une réserve lors de la réception, de prouver qu'à cette date elle n'était pas apparente pour lui.


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